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La ligue 1 au bord de l'implosion : Montpellier un incident symptomatique ou le début d’une révolte des tribunes françaises ?

  • leobocquillon
  • 17 mars
  • 8 min de lecture

Dernière mise à jour : 18 mars

Aujourd'hui j’ai mal à ma Ligue 1. Celle des années 90 et 2000, où les stars illuminaient nos pelouses, de Pauleta à Juninho, de Drogba à Gourcuff. Où les stades vibraient sous les chants des supporters, où Geoffroy-Guichard, le Vélodrome et le Parc des Princes résonnaient d’une ferveur pure. Où la voix de Thierry Gilardi donnait des frissons à chaque but. Aujourd’hui, ce football-là semble bien loin, sacrifié sur l’autel du business et des décisions absurdes.


J’ai mal à cette Ligue 1 qui nous faisait découvrir la France, celle des villes oubliées qui ne vivaient que par leur club. Sochaux, Sedan, Gueugnon, Bastia, Auxerre… des noms qui résonnaient comme des leçons de géographie apprises au rythme des multiplex. Une époque où le football sentait le romantisme, où chaque match racontait une histoire d’hommes et de passion. Ces stades nichés au cœur de régions ouvrières, où le football était bien plus qu’un jeu, une fierté locale. Aujourd’hui, ces clubs ont disparu de l’élite, emportés par une gestion froide et déshumanisée. Quelle était belle ma farmers League.




Ce week-end, le football français a une nouvelle fois été éclaboussé par un incident majeur : des débordements en tribunes à Montpellier, mettant en lumière une situation devenue intenable. Si certains tentent de minimiser cet événement en le qualifiant d’incident isolé dû aux tensions internes du club, d’autres y voient le symptôme d’un malaise profond, enraciné dans vingt années d’ingérence de la Ligue de Football Professionnel. Une révolte des tribunes semble en gestation, conséquence d’une gestion autoritaire et déconnectée des réalités du football populaire.


Un incident symptomatique ou le début d’une révolte des tribunes françaises ?


L’affaire montpelliéraine est-elle un cas unique ? Certainement pas. Depuis des années, les clubs français vivent sous le joug d’une LFP omnipotente, imposant des décisions sans concertation, méprisant les acteurs historiques du football, et cherchant avant tout à satisfaire les exigences des diffuseurs et des politiques en quête de reconnaissance. Montpellier n’est qu’un épisode de plus dans une suite d’affrontements larvés entre supporters et dirigeants.



On en est a suspendre des matchs pour des chants anti ligue...
On en est a suspendre des matchs pour des chants anti ligue...


Prenons l’exemple des multiples incidents ayant émaillé ces dernières années : le match suspendu entre Toulouse et Monaco pour des chants "anti LFP", la fermeture abusive de tribunes à répétition, ou encore les interdictions de déplacement systématiques touchant de nombreux groupes ultras. Cette politique de sanctions collectives, appliquée sans discernement, contribue à creuser un fossé de plus en plus profond entre les supporters et les instances du football français.


Le football français : une scène de cinéma aux scénarios prévisibles


Le football, dans sa version moderne, est devenu un produit médiatique aseptisé où l’authenticité est sacrifiée sur l’autel du spectacle. La Ligue, en collaboration avec les diffuseurs, impose des horaires absurdes, déconnectés des réalités des supporters. Elle cherche à créer un produit "grand public", en dénaturant l’essence même du football.


Ce football business ressemble de plus en plus à une production cinématographique, où les acteurs principaux ne sont plus les joueurs ni les supporters, mais les dirigeants de la LFP et les politiques avides de notoriété. Vincent Labrune, président de la LFP, incarne cette dérive. Ancien président de l’Olympique de Marseille, où il a laissé un souvenir amer en raison de sa gestion chaotique, il applique désormais les mêmes méthodes à l’échelle du championnat. Son obsession pour maximiser les droits TV au détriment de l’expérience en tribunes illustre parfaitement cette dérive.


L’impact toxique des droits TV sur le football français


Les droits TV sont devenus le nerf de la guerre pour la LFP, qui mise tout sur leur augmentation pour assurer la viabilité du championnat. Pourtant, cette dépendance excessive aux revenus télévisés s’est révélée catastrophique. Le fiasco Mediapro en 2020 en est l’exemple le plus marquant : un contrat mirobolant de 1,2 milliard d’euros annuels promis par le groupe espagnol a été un énorme échec, laissant les clubs dans une situation financière dramatique. Cet épisode a mis en lumière la fragilité d’un système qui repose sur des revenus incertains, sans véritable stratégie alternative.


Cette course effrénée aux droits TV a aussi des conséquences directes sur les supporters. Pour maximiser l’audience télévisée, la LFP impose des horaires inadaptés : des matchs programmés le vendredi soir ou le dimanche à 13h, au mépris des conditions de déplacement des fans. Contrairement à l’Angleterre, où les stades sont remplis grâce à une stratégie marketing cohérente, la France peine à attirer du public dans les enceintes sportives.


Pire encore, l’augmentation des droits TV n’a pas permis au championnat de progresser sportivement. Les clubs français continuent de vendre leurs meilleurs joueurs à l’étranger faute de ressources suffisantes, ce qui affaiblit la compétitivité de la Ligue 1. L’argent des droits TV est souvent mal réparti et ne sert pas à développer des infrastructures ou à améliorer la formation des jeunes talents.


L’incompétence politique et l’illusion de l’autorité


Le football français est aussi gangrené par une classe politique, avide de toute opportunité de récupération politique, qui voit en lui un outil de communication plus qu’un patrimoine à protéger. À chaque incident, les ministres et élus s’empressent de condamner les ultras, les désignant comme responsables de tous les maux du football. Cette stratégie masque leur incompétence et leur incapacité à comprendre les réalités du sport. Plutôt que de dialoguer avec les acteurs du terrain, ils préfèrent légiférer à outrance, interdire, réprimer et imposer des sanctions collectives absurdes.


Bruno Retailleau en est un exemple frappant. Le ministre de l'Intérieur a récemment enclenché un processus de dissolution visant cinq associations de supporters, dont la Brigade Loire (Nantes), les Magic Fans et les Green Angels (Saint-Étienne), ainsi que la Légion X (Paris FC), qu’il assimile à des organisations criminelles. Cette vision caricaturale et répressive pourrait bien être le clou final sur le cercueil du football français. Au lieu de chercher à comprendre le rôle fondamental des groupes ultras dans l’animation et l’histoire des clubs, il préfère jouer la carte de la répression aveugle, sous couvert de sécurité publique.


Non monsieur Retailleau tous les ultras ne sont pas des hooligans. Il est communément admis que la principale distinction entre les ultras et les hooligans réside dans leur propension à la violence, mais en réalité, la disparité entre eux est bien plus profonde.

Cette différence est évidente dans leur structure organisationnelle, leur participation au spectacle du football, leur lien avec le monde du football et leur approche de la violence. Les hooligans cherchent avant tout la confrontation, que ce soit avec des supporters extrémistes rivaux ou avec les forces de l'ordre. Ils s'investissent peu dans l'ambiance du stade ou dans les activités du club.

À l'inverse, les ultras considèrent la violence comme un moyen d'action parmi d'autres. En effet, les ultras s'engagent activement à soutenir l'équipe et à dynamiser l'atmosphère du stade en orchestrant les tifos qui ornent les gradins lors de l'entrée des joueurs. En outre, ils s'efforcent d'avoir une influence au sein de leur club, en cherchant à nouer des liens avec la direction. Contrairement aux hooligans qui forment des bandes informelles, les groupes ultras adoptent une approche associative plus structurée : les membres paient une cotisation annuelle, un conseil d'administration supervise les activités et les représentants discutent avec les autorités du football tout en faisant des apparitions dans les médias. Les associations de supporters jouent un rôle social crucial, tant dans le domaine du football qu’au sein des communautés locales.

Ces associations facilitent l'intégration sociale des supporters en leur offrant un cadre structuré, un réseau de socialisation, des connexions avec d'autres supporters et un espace commun (souvent sous la forme d'un bar ou d'un établissement de proximité géré par l'association elle-même). Ils s'engagent également dans diverses activités, notamment des initiatives axées sur l'éducation des jeunes supporters, la prise en charge des enfants et l'offre d'opportunités de développement personnel, en particulier au sein des groupes ultra.

Au-delà de leur implication dans l'ambiance des stades, ces associations assurent la liaison avec les dirigeants des clubs, transmettant les attentes de leurs membres et du public au sens large. Leur nature associative étend leur engagement à d'autres domaines sociétaux, collaborant fréquemment avec d'autres associations, notamment dans le cadre d'œuvres caritatives et d'autres initiatives communautaires. Essentiellement, ces associations de supporters servent d’intermédiaires essentiels entre la direction du club, les supporters et les causes sociales plus larges.



je vous laisse deviner quelle a été la réponse de la classe politique française.
je vous laisse deviner quelle a été la réponse de la classe politique française.


Une gestion désastreuse en comparaison avec les autres championnats


Alors que le football français sombre dans une crise structurelle, d'autres grands championnats européens montrent l'exemple. En Allemagne, les supporters sont respectés et impliqués dans la gestion des clubs grâce au modèle du "50+1", garantissant que les investisseurs ne puissent pas prendre le contrôle total des équipes.

Le concept national de sport et de sécurité allemand incarne un effort visant à favoriser une action coordonnée entre les différentes parties prenantes du football allemand . Cette initiative implique l'établissement de protocoles pour le développement de projets de fans, décrivant les objectifs, les conditions de mise en œuvre à l'échelle nationale et les méthodes de financement. Cela comprend également la formulation de réglementations municipales régissant le comportement dans les stades, l'application de mesures d'interdiction d'accès aux stades, l'orchestration de la sécurité les jours de match et la mise en œuvre de normes de construction et de sécurité.

Par conséquent, les responsabilités des Fan Projects, unifiés sous une coordination nationale au sein de la Deutsche Sport Jugend (DSJ), peuvent être délimitées comme suit : entreprendre des initiatives dirigées vers les supporters, englobant non seulement ceux identifiés comme hooligans ; étendre la portée des Fan Projects à toutes les villes abritant des clubs de haut niveau et ceux des divisions inférieures confrontés à des problèmes structurels , une situation qui prévaut dans presque tous les endroits, à l'exception du Bayern Munich. 

Les principes qui guident l'engagement auprès des supporters consistent à contribuer au développement de projets individuels ou collectifs axés sur l'autonomisation des jeunes. Cette aide comprend la fourniture d'activités de loisirs non commerciales, la facilitation des interactions avec des supporters d'autres pays et la participation à des activités jugées à haut risque. Le soutien s’étend également à l’offre de conseils sociaux, de santé ou juridiques pour aider les individus à faire face à des situations difficiles. En outre, le travail comprend l'établissement de relations avec des institutions, notamment dans des situations de conflit avec des clubs ou des forces de l'ordre, dans une perspective plus large de favoriser des collaborations à long terme avec ces entités ou d'autres. Ces efforts visent à assurer la sécurité des supporters itinérants et à désamorcer les tensions avec d’autres groupes de supporters ou avec les institutions locales.



Résultat du travail allemand et des Fan Projekts: un parcage visiteur de 15 000 personnes pour Schalke en Bundesliga 2.
Résultat du travail allemand et des Fan Projekts: un parcage visiteur de 15 000 personnes pour Schalke en Bundesliga 2.


L'exemple de l'Italie est également pertinent. Malgré des problèmes structurels, les clubs italiens parviennent à maintenir une relation forte avec leurs tifosi, en favorisant des politiques de billetterie accessibles et en instaurant des dialogues réguliers entre dirigeants et supporters. En Espagne, le FC Barcelone et le Real Madrid, sous leur modèle associatif, conservent un lien direct avec leurs socios, leur garantissant un pouvoir décisionnaire sur les grandes orientations du club.


En revanche, en France, la LFP continue de prendre des décisions qui fragilisent le championnat. La gestion catastrophique des droits TV, avec le fiasco Mediapro en 2020, a démontré l'incapacité de la Ligue à anticiper les conséquences de ses choix économiques. Les restrictions abusives sur les déplacements de supporters, la multiplication des huis clos et des sanctions collectives témoignent d'un mépris profond pour ceux qui font vivre le football. Les clubs français peinent à rivaliser sur la scène européenne, faute d'une vision claire et d'un projet cohérent.


Vers une explosion inévitable ?


L'incident de Montpellier n'est probablement qu'un avant-goût de ce qui attend le football français si la Ligue et les autorités persistent dans leur politique répressive et incohérente. À force de mépriser les supporters et de sacrifier l'âme du football sur l'autel du business, la situation pourrait dégénérer en un mouvement de contestation généralisé. Les ultras, loin d'être les ennemis du football, en sont le dernier rempart contre sa marchandisation extrême.


Liberté pour les ultras.

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